Conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan : l’Europe laisse-t-elle la place à Poutine ?

Alors que le 31 octobre, l’Arménie et l’Azerbaïdjan ont accepté de “ne pas recourir à la force” lors d’un sommet organisé par la Russie, des bombardements ont eu lieu à la frontière ce lundi 7 novembre, a fait savoir Radio France.

Les deux pays se sont mutuellement accusés de bombardements frontaliers.

Thorniké Gordadzé, ancien ministre géorgien de l’intégration européenne, enseignant à Sciences Po ; Taline Ter Minassian, historienne, directrice de l’Observatoire des États post-soviétiques, professeure d’histoire contemporaine de la Russie et du Caucase à l’Inalco, l’Institut national des langues et civilisations orientales ; Jean-Sylvestre Mongrenier, docteur en géopolitique, reviennent sur le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

Selon Taline Ter Minassian, la rencontre entre le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien sous les auspices de Poutine à Sotchi n’est pas d’une grande importance. Elle note que les forces russes d’interposition sont toujours présentes dans la région. La Russie, selon la chercheuse, a peur de l’ouverture du “deuxième front” – “le front” de l’Occident qui viendrait pour soutenir les Arméniens. Taline Ter Minassian note également que l’Iran ne veut pas de changements de frontières. 

“Il y a une concurrence parmi les intermédiaires pour arriver à une solution”, affirme Thorniké Gordadzé. “C’est assez paradoxal de voir qu’il y a un retour des acteurs dans le processus de négociation, alors qu’à l’issue de la guerre de 44 jours qui s’est terminée avec la victoire militaire d’Azerbaïdjan, les acteurs non régionaux n’étaient plus tellement présents. Il n’y avait que Moscou et Ankara, qui étaient présents. Aujourd’hui on voit un changement qui est lié au fait que la Russie s’affaiblit à cause des problèmes qu’elle connaît en Ukraine.”

Il note que l’Azerbaïdjan souhaiterait avoir une connexion avec son exclave du Nakhitchevan, située en Arménie. “L’Azerbaïdjan voudrait que ce lieu de passage ait le statut du corridor, c’est-à-dire que les Arméniens ne puissent pas contrôler les voitures ou les marchandises qui transitent par ce territoire d’un bout de l’Azerbaïdjan vers l’autre bout de l’Azerbaïdjan.”

Thorniké Gordadzé fait remarquer que la paix entre les deux pays est très importante pour la Géorgie aussi, parce que ce pays abrite deux minorités ethniques, de taille quasiment comparable, d’Arméniens et d’Azéris.

Gordadzé souligne la nécessité de délimitation des frontières. “L’absence de cette délimitation constitue une ressource pour le reprise des hostilités.”

“C’est vrai qu’après la guerre de 44 jours, on avait l’impression que la Russie avait repris la situation en main. La quasi-totalité du Caucase du Sud était en train de repasser sous contrôle russe. Il y a des troupes sur le territoire géorgien, il y a des bases russes en Arménie. Le conflit à l’automne 2020 avait permis à la Russie de déployer à peu près 2000 hommes sur le territoire du Haut-Karabakh, qui, juridiquement et internationalement est considéré comme azerbaïdjanais”, note Jean-Sylvestre Mongrenier.

Mongrenier fait remarquer que l’Iran sert de source d’approvisionnement énergétique pour l’Arménie. “Mais ce qu’il faut également rappeler, c’est qu’à l’automne 2020, la diplomatie iranienne était fort mal à l’aise, parce qu’il y a plus d’Azéris en Iran, qu’il y a d’Azéris en Azerbaïdjan.”

 

Source: Radio France

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