Thierry Valle, directeur de Coordination des Associations et des Particuliers pour la Liberté de Conscience, plaide, dans son article publié mardi 25 octobre dans le magazine d’actualité en ligne Causeur, pour que se mettent en place les véritables conditions pour une véritable réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
“Malgré les efforts de médiation de l’UE – et notamment de la France – pour favoriser un accord de paix durable entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, le président Macron a fait une déclaration dans laquelle il semble prendre parti pour l’Arménie. Le risque de cette déclaration est double : mettre en péril le rôle de médiateur de la France et renforcer l’influence de la Russie dans ce conflit”, affirme Thierry Valle.
Selon lui, le processus de normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan se distingue par sa complexité, car il existe une méfiance mutuelle envers les parties en conflit, causée par trois décennies d’inimitié.
“Au cœur de ce conflit, il existe deux enjeux cruciaux.
Le premier est l’enjeu de l’intégrité territoriale qui, selon les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, a été violée par les troupes arméniennes qui, au cours des 30 dernières années, ont occupé environ 20 % des territoires azerbaïdjanais internationalement reconnus.
Le second est la sécurité des Arméniens du Haut-Karabakh – une enclave en Azerbaïdjan où le déclenchement du mouvement séparatiste a coïncidé avec l’effondrement de l’Union soviétique.”
Thierry Valle rappelle que depuis l’année dernière, l’UE intervient dans les discussions pour servir de médiateur entre les deux États en vue de parvenir à une paix durable, mais également en vue de réduire la dépendance des deux parties vis-à-vis de la Russie. Afin de réduire le monopole russe dans la région, l’envoi d’observateurs de l’UE à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan a été convenu.
Valle note que les déclarations de Macron, selon lesquelles “l’Arménie a toujours lutté pour la tolérance et la paix dans région” et “l’Arménie était au Karabakh parce que le Karabakh est au coeur de ce pays” constituent une atteinte à un principe fondamental des normes internationales, tel que l’intégrité territoriale et nuisent au rôle de la France en tant que médiateur impartial dans le processus de stabilisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
“En raison du leadership de la France au sein de l’UE et de l’association étroite du président français avec le processus de médiation de l’UE, la déclaration jette une ombre sur tous les efforts européens récents visant à mettre Bakou et Erevan en négociations directes pour un accord de paix historique.”
Selon l’auteur de l’article, cette déclaration d’Emmanuel Macron porte également atteinte au principe “Égalité” de la devise de la République française.
Thierry Valle fait remarquer que la conférence qui a eu lieu en marge du Conseil des droits de l’homme à Genève avait pour but de développer un contexte pour favoriser le dialogue entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. “Cette conférence a mis l’accent sur “la page la plus horrible et la plus sombre de l’ancien conflit du Karabakh, à savoir le massacre de civils azerbaïdjanais innocents dans la ville de Khodjaly. En une seule nuit, le 26 février 1992, lorsque les forces arméniennes se sont emparées de la ville, 613 civils innocents, dont 63 enfants, 106 femmes et 70 personnes âgées, ont été brutalement assassinés, 487 civils ont été gravement blessés et un millier d’entre eux ont été pris en otage”, fait savoir Valle.
“Le massacre de Khojaly est l’objet d’une inimitié de longue date entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Et ce n’est certainement pas la manière d’agir attendue d’un état tel que l’Arménie qui a “lutté pour la tolérance et la paix dans cette région”.
La Coalition des ONG européennes a abordé de manière innovante ce sombre souvenir du massacre le plus sanglant de la guerre du Karabakh : demandant à ce que la justice transitionnelle soit appliquée pour que les blessures des victimes soient pansées, le comité de la Coalition réuni à l’ONU a conclu qu’encourager l’Arménie à reconnaître comme il convient le massacre de Khojaly et à présenter des excuses publiques à ses victimes, ainsi qu’encourager l’Azerbaïdjan à ouvrir un espace public pour un dialogue direct sur la question de Khojaly entre les sociétés civiles des deux pays – serait une étape importante pour l’établissement d’une véritable réconciliation entre les peuples”, affirme l’auteur de l’article.
“En tant que citoyen français attaché aux valeurs de la République et en tant que défenseur des droits de l’homme qui se consacre à la lutte pour la justice, la dignité humaine et la paix, je sollicite votre responsabilité politique et morale qui exige de satisfaire les doléances des deux parties afin de renforcer le processus de paix”, dit-il s’adressant à Emmanuel Macron.
Thierry Valle insiste sur le fait qu’il est nécessaire pour l’engagement d’un processus de paix durable d’amener le gouvernement arménien à “briser le tabou autour de Khojaly”, de reconnaître la gravité de ce crime perpétré par par les gouvernements précédents. En ce faisant, selon Valle, la France restaurera sa position impartiale dans la politique de cette région.
Source: Causeur